Les nominations à la magistrature et dans l’armée divisent Ilunga et Kankonde

St Augustin K. ( saintaugustink@gmail.com)

Le climat n’est plus au beau fixe entre Sylvestre Ilunga Ilunkamba, Premier ministre et Gilbert Kankonde, vice-Premier ministre, ministre de l’Intérieur, Sécurité et Affaires coutumières. La pomme de discorde, ce sont les ordonnances présidentielles de nominations au sein de la magistrature et dans l’armée ; lesquelles ont été contresignées par le vice-Premier ministre Gilbert Kankonde, à l’absence du Premier ministre Inlunkamba en mission à Lubumbashi, dans le Haut-Katanga, du 16 au 19 juillet 2020 et sans se référer à lui.

Alors qu’il était au salon en train de suivre la télévision, Sylvestre Ilunga sera étonné de la lecture de ces ordonnances. Le VPM à qui il a laissé l’intérim n’a pas pris soin, même pas l’élégance de l’en informer avant de poser le contreseing, acte de haute portée juridique sur ces ordonnances présidentielles.

Revenu sur Kinshasa, Ilunga Ilnkamba s’est dit frustré par cet acte qui dénote non seulement d’un manque de confiance de la part, mais surtout un acte irrévérencieux de Gilbert Kankonde.

Ne pouvant contenir cette frustration, le PM Ilunga Ilnkamba a, par la bouche, d’Albert Lieke, son porte-parole, fait une déclaration en ces termes :

«  Le Premier ministre, chef du gouvernement, porte à la connaissance de l’opinion ce qui suit : sur instruction du président de la République, chef de l’Etat, M. Le premier ministre a effectué une mission à Lubumbashi, du 16 au 19 juillet 2020. A cet effet, par sa lettre du 16 juillet 2020, le Premier ministre a conféré l’intérim au vice-Premier ministre, ministre de l’Intérieur, Sécurité et Affaires coutumières, tout en circonscrivant à sa portée, à savoir : Veuillez à ce que tout courrier destiné au Premier ministre soit réceptionné à son cabinet avant toute réorientation, le joindre en cas de nécessité. Au courant de la journée du vendredi 17 juillet 2020, alors que le Conseil des ministres se tenait, plusieurs ordonnances signées par le président de la République et contresignées pour le compte du Premier ministre par vice-Premier ministre, ministre de l’Intérieur, Sécurité et Affaires coutumières ont été rendues publiques sur la Radiotélévision nationale congolaise (RTNC) à la grande surprise du Premier ministre sans que l’intérimaire ne l’en ait informé préalablement. Le contreseing est un acte de haute portée politique et juridique qui relève de la compétence exclusive attachée à la qualité de Premier ministre et qui ne peut se concevoir dans le cadre de l’intérim tel que circonscrit dans la lettre qu’il a conférée au vice-Premier ministre, ministre de l’Intérieur, Sécurité et Affaires coutumières. S’agissant d’un gouvernement de coalition, le contreseing du Premier ministre constitue, au-delà de sa nature juridique, le gage des équilibres des pouvoirs entre le président de la République et le Premier ministre qui est l’émanation de l’Assemblée nationale. Au regard de ce qui précède, le Premier ministre se propose de rencontrer de nouveau le président de la République en vue de tirer au clair cette situation préoccupante ».

Driblé par Kankonde, Ilunkamba va pleurnicher chez Tshisekedi

La communication du PM est vraiment inopportune. Elle ne valait même pas d’être rendue publique avant d’avoir rencontré le chef de l’Etat, surtout qu’elle tombe tardivement. Si le Premier ministre était courageux, il tirerait simplement les conséquences de cet acte posé par le VPM Gilbert Kankonde. De deux choses, l’une. Ou bien, il sanctionne son VPM en le révoquant pour avoir outrepassé les limites de l’intérim lui confié par le PM, chef du gouvernement, ou bien, il tire son épingle du jeu en déposant sa démission, surtout qu’il avait déjà menacé, quelques jours auparavant avec l’affaire Tunda ya Kasende.

Les mêmes causes produisant les mêmes effets, Ilunkamba a eu l’outrecuidance de recadrer publiquement le chef de l’Etat, en moins d’un mois. Il y a indiscipline au sein de ce gouvernement qui est appelé à vider le plancher.

Ilunga Ilunkamba peut être rassuré que le chef de l’Etat ne reviendra plus sur ces ordonnances déjà signées et rendues publiques. En tout cas, Félix Tshisekedi en a déjà donné la preuve de sa constance et de sa fermeté dans la décision. Pour s’en convaincre, les ordonnances des nominations des animateurs à la Gécamines et à la SNCC ont mis le temps qu’elles ont mis, mais elles ont fini par être exécutées, un an après.

A en croire Me Willy Wenga, avocat au barreau de Kinshasa/Gombe et praticien du droit, pour avoir conféré légalement l’intérim, par écrit du reste au VPM Gilbert Kankonde, il y a aucune faute que le VPM de l’Intérieur ait contresigné ces ordonnances. De son avis, la difficulté se situe au plan politique simplement.

Tout ce qui reste au Premier ministre, c’est tirer les conséquences de cet acte en déposant sa démission pour son honneur, car c’est un acte de désaveu et de manque de confiance. Le coup a été joué derrière son dos et comme un  petit enfant, incapable de prendre une décision courageuse, s’en va pleurnicher vers un plus puissant. Quel gâchis !

« Le contreseing est du gouvernement et pas forcément du Premier ministre », dixit un juge de la Cour Constitutionnelle